Maurice Mourlot

Peu d'œuvre donne beaucoup d'amour-propre, beaucoup de travail donne infiniment de modestie.       (La Comédie Humaine) Balzac 

Maurice Mourlot naît le 20 janvier 1906 à Paris. Il est le dernier d’une famille de neuf enfants. Le père, Jules Mourlot a fondé rue Saint Maur une imprimerie lithographique. La vie de Maurice est rapidement bouleversée. En effet, il n’a que huit ans lorsque la Première Guerre Mondiale éclate, ses deux frères aînés, Georges et Fernand vont se battre à Verdun. Ce dernier reviendra avec une grave blessure à l’œil. Parallèlement, sa sœur Yvonne meurt de turberculose osseuse en 1917, suivie de près par sa mère, Clémence, âgée de 55 ans, en 1918. Le père mourra de chagrin en 1920, laissant à son fils Fernand le soin de mener les destinées de l’imprimerie. Assez rapidement, Fernand Mourlot transforme l’imprimerie commerciale en imprimerie d’art qui sera fréquentée par les plus grands artistes de l’Entre-Deux-Guerres. Matisse, Picasso, Braque, Chagall y travailleront régulièrement.
Maurice Mourlot, le petit frère, devient à son tour lithographe et fait ses débuts à l’imprimerie en 1922; il y exécute pour le compte des Musées nationaux une série d’affiches d’expositions prestigieuses. Rapidement ses dons artistiques apparaissent, son goût est sûr, il seconde son frère Fernand d’une manière efficace et précieuse, tout en restant toujours à l’arrière-plan, guidé par une grande timidité.
Toutefois, Maurice Mourlot n’est pas seulement un lithographe, il est aussi un peintre, qui encouragé par son ami Richard Maguet, expose ses toiles dès 1934 et reçoit en 1937 le prix de peinture de la Ville de Paris. Comme bon nombre d’artistes de son époque, il obtient en 1937 une bourse du gouvernement français et part en Afrique du Nord. De retour en France en septembre 1938, il rapporte du Maroc et de l’Algérie une moisson de dessins et d’huiles.
Il s’installe en 1938 au Perreux, avec Marceline, sa compagne. Vient la Seconde Guerre mondiale et Maurice doit rejoindre avec d’autres artistes, une compagnie du Génie, chargée du camouflage. L’ennui est grand et Maurice remplit ses carnets de dessins.
En 1941, sur les conseils de son ami, le peintre Pierre-Eugène Clairin, Maurice vient s’installer en Seine-et-Marne, à Saint Loup de Naud, dans l’ancienne maison d’école qu’il a rachetée. Le citadin s’intègrera très rapidement à la vie du village, allant peindre sur le motif, paysages, animaux et cours de ferme, sans oublier les habitants. Il est à cette époque le peintre et le témoin de cette vie rurale aujourd’hui disparue.
 Marceline, sa compagne est le modèle privilégié de ces années, des dessins très nombreux nous la montrent, un chat, un chien ou une poule sur les genoux, arrangeant des fleurs ou épluchant des légumes, raccommodant ou tricotant.
Saint Loup restera jusqu’au bout une source d’inspiration profonde pour Maurice Mourlot et il continuera de partager son temps entre Paris et son village où il se sent bien.
À partir de 1961, il travaille pour l’éditeur Bordas, ce qui lui permet de continuer à peindre sans trop de soucis matériels. À  Paris, dans les années 60, il se rend souvent au Jardin des Plantes pour y dessiner ou y peindre les animaux de la ménagerie. Parallèlement, il commence à se consacrer à la nature morte, genre qu’il privilégiera très largement jusqu’à sa mort, le 15 mars 1983, dans son atelier de la Rue de la Tombe-Issoire
 
Voici un autre texte plus personnel  écrit par la fille de l’ancien directeur d’école, Marie-Claude Deshayes-Rodrigues,  professeur d’allemand à la  faculté de Jussieu et licière, qui  l’a bien connu et a fait don à la commune de deux tableaux du peintre : Une Nativité et un Grand Bouquet qui ornent la salle de ka Mairie.
 Maurice Mourlot et Saint Loup de Naud
Lorsque Maurice vint à Saint-Loup, c’était l’occupation .Il avait auparavant été mobilisé dans une compagnie dite de « fiction », affectée au camouflage. Elle réunissait des peintres, des sculpteurs, des écrivains, des comédiens. Jean-Louis Barrault en faisait partie. En l’absence de tâches précises à accomplir, Maurice remplissait des carnets à dessins…Revenu à Paris après l’armistice de Pétain, il suivit le conseil de Pierre-Eugène Clairin et vint s’installer à Saint-Loup où il acheta pour un prix modique, la vieille maison d’école désaffectée du village. Située en contrebas de l’église, cette maison d’un étage avec une petite terrasse plantée d’arbres et donnant sur la vallée, fut du goût de Maurice et de Marceline qui ne procédèrent à aucun changement. De toutes  façons leurs finances ne le leur auraient pas permis. Mais ils s’accordaient avec l’austérité des murs gris, les tomettes usées, la pierre à évier en grès. Ils achetèrent quelques meubles de la région, une table ronde en noyer et quatre chaises paillées, un buffet briard qui servit de présentoir à un grand nombre de natures mortes.
Marceline venait du Périgord ; c’était une campagnarde qui savait se débrouiller pour tuer et plumer la volaille, faire des conserves, coudre et tricoter. Mais elle était aussi un personnage rêveur, aimant lire la poésie, s’accommodant mieux de la compagnie des animaux que de celle des humains qui parfois trouvaient cette femme un peu étrange. Elle aimait la peinture de Maurice et posait volontiers, comme en attestent les très nombreux dessins et peintures qui la représentent dans ses activités domestiques ou dans son repos. La voici sur une grande huile comme absorbée par un rêve, au bord d’une table chargée de victuailles à préparer, le couteau dans sa main retombée sur la table, tandis que le chien Miette repère de la truffe, les odeurs intéressantes. Sur d’autres toiles, on la voit repriser un linge blanc ou une chaussette, le pied posé sur un barreau de chaise. La voici encore dehors, debout à contempler la vallée appuyée sur un arbre ou dedans, assise près de la fenêtre, absorbée dans sa lecture ou, dans sa cuisine, avec son tablier bleu, cherchant un objet improbable dans le placard.
Quant à Maurice, il s’en allait toujours peindre sur le motif. N’ayant pas de voiture, il n’allait pas travailler, comme Clairin, dans la région. Saint-Loup était l’objet exclusif de ses attentions. Il fut bientôt familier de la plupart des fermes dont il aimait les cours et les solides bâtiments : étables et écuries peuplées de vaches, de chevaux voisinant avec les poules sous le vol des hirondelles. Maurice passait dans les rues de Saint-Loup, silhouette grise  et trapue ; Plus tard, le dos un peu voûté, béret noir vissé sur sa tête, avec souvent un bout de ficelle en guise de ceinture ou de lacet de chaussure. Peu disert, il ponctuait les phrases de son interlocuteur, par un double raclement de la gorge discret qui mettait bien vite ce dernier dans l’embarras et empêchait qu’on entretint avec lui de longues conversations…Son humour captait la drôlerie des petites scènes de tous les jours : un chat qui guette un plat pendant que les gens font la conversation dans la cuisine, la tendresse d’une attitude, la paix rassurante de gestes quotidiens. Il aimait bien les habitants du village et il est rare qu’un paysage ne soit pas animé de la silhouette du jardinier, d’un promeneur, d’une fermière ou du facteur. La forge qu’il a souvent dessinée et quelquefois peinte semble avoir été l’un de ses lieux de prédilection.
Il aimait Saint-Loup en toutes saisons : le Saint-Loup léger du début du printemps, lorsque les peupliers rosissent au bord du Dragon, le village égayé des arbres en fleurs sous des ciels d’un bleu léger ou somnolent, paisible dans les verdures de l’été, entouré des ocres lumineux des moissons. Mais il aimait aussi Saint-Loup dans ces aspects les plus austères : le village comme tapi sous des ciels lourds de grêle ou de grosses pluies glacées, les brumes de l’hiver qui montent des terres labourées pour se mêler à l’haleine fumante des chevaux attelés aux charrues et la viorne qui accroche aux arbres nus ses touffes de coton gris.
Maurice Mourlot a pénétré comme par osmose cette campagne où il allait planter son chevalet si bien  que, par un renversement des perspectives, l’amateur de peinture venant à Saint-Loup et portant ses pas  dans les rues et les chemins se surprendra à penser en découvrant un paysage :" Tiens,  un Mourlot !"

Facebook
Coq et Poule
Lithographie

La forge, le ferrage des chevaux
St Loup vu du cimetière
Huile / Toile
Maurice Mourlot
Autoportrait
Huile / Toile

Retour des chevaux dans la brume
Huile / Toile

La moisson
Huile / Toile